À quatorze ans.
15,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Pour témoigner, les mots ne manquent jamais ; c'est notre capacité à les mobiliser qui peut être affectée par l'intensité de l'événement. Il était donc pertinent de s'immiscer dans cet univers vampirisant : surfer sur le tsunami, ou fuir en vain les terres qu'il menace ? On touche à la souche des maux sociétaux actuels : refoulements, harcèlements polymorphes, hypocrisie sociale, discriminations, survie en communauté, cadres éducatifs et familiaux dépassés. Personne n'est à sa place ; mais essentialiser cette génération était à mon sens une erreur.
Amour fou.
17,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Une originalité appréciable dans les problématiques soulevées : rôle(s) de l'amour, valeur de la vie et déterminismes sociaux émergent curieusement dans ce microcosme nobiliaire où l'authenticité sonne toujours faux. Le mal-être est présenté dans son essence à la fois comique, dramatique, absurde parfois. L'essoufflement rapide du scénario est compensé par des plans abrupts au classicisme exacerbé, (bien que toujours séduisants), tandis que les acteurs, costumes et décors sont d'une qualité remarquable.
Big Eyes.
19,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Décalé, l'univers burtonien ? Jusqu'à son propre registre. Mais toujours cette capacité de saisir la réalité par le trou de la serrure. Peindre, c'est d'abord dépeindre : un système marchandisant auquel on soumet son intériorité, dichotomie funeste entre l'art et sa promotion. Un cynisme naturel, pénétrant, et d'autant mieux dénonciateur de dérives humaines invisibles aux insensibles. D'élégants contrastes entre les protagonistes, via ce fascinant équilibre entre vulgarité et finesse. Est-il donc nécessaire de regretter certains légers excès théâtraux au cours du procès ?
Birdman.
19,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Les réalités se frôlent ; les comédiens en sont le ciment instable. Quel est le rôle du rôle ? Une exquise intrusion dans l'intimité de ces illustres Sisyphe admirés mais si méconnus, condamnés à fuir le vide sans jamais atteindre un quelconque horizon. Les répliques cinglantes dévoilent le mot tantôt outil stérile, tantôt glaive ensanglanté. Un plan-séquence déroutant mais déroulant la cohérence filigranée d'un univers où tout se superpose... sans pause. Profession-refuge des maudits ou véritable schizophrénie professionnelle au service d'un public aisé ?
Coco avant Chanel.
18,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
L'irrésistible ascension d'une personnalité puissante par son insatiable soif d'indépendance et de reconnaissance. Un rôle "taillé sur mesure" à Audrey Tautou, dont l'excellence tend à se normaliser. L'émotion est là : les destins en devenir trouveront chaussure à leur pied, bouleversés par cet idéal de consanguinité entre rupture sociale méritante, authenticité à peine voilée et révolution personnalisée. On dévêt le mythe pour mieux l'orner. Du grand art, sans fioritures ; merci.
De bon matin.
17,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Pédagogie, clarté, efficacité : toute fioriture spectaculaire aurait en effet nui à la compréhension de ce flashback d'une descente aux Enfers inexorable : déstructuration mentale, violence extrême sans hématome et segmentation individualiste brisent vertus et principes sans considération du secteur d'activité ou de la personnalité initiaux. Malgré un mélimélo troublant concernant la vie familiale de Paul, de très nobles qualités cinématographiques, en tous points de vue.
Gainsbourg, Vie héroïque.
14,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Diabolique entrée dans une de ces niches de vie étanches au monde. On présente un artiste maudit jusqu'aux gènes, dont le génie gêne, irrite, mais palpe et captive. Entre ambivalences apparentes et cohérence intime, la caricature était difficile à éviter. On semble parfois s'éloigner de l'intérêt biographique, et les effets spéciaux laissent parfois à désirer. Représenter l'audace par l'audace était pertinent, mais ne paie pas toujours ; il faut savoir ne pas se laisser dépasser par son objet.
Kertu.
18,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
À moins de vivre en autarcie, la campagne n'a rien de reposant : elle n'est qu'un microcosme urbain, les tentacules de l'Etat en moins. Elle a ses lois : le non-dit, le tacite, le secret, le complot, la traîtrise ; le repli. Malheur à ceux qu'elle marginalise et dénature en toute impunité. Un brillant, mais sombre état des lieux sur la communautarisation humaine en tant qu'elle brise le respect par sa morale. Jusqu'à ce que la violence brise son propre cercle. Une saine approche du malsain ; palpitant.
Kingsman : Services secrets.
14,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
À la fois exaspérant et magnétique, dérangeant et complice, redondant et borderline, recyclé et révolutionnaire ; le chaud et le froid sont soufflés en permanence. Au premier degré, une n-ième comédie d'espionnage. Au second, sa caricature hilarante. Au troisième, un film sui generis dont la finalité est de jouer avec nos réflexes de catégorisation. Il faut parfois cesser d'intellectualiser, et savoir profiter d'une violence subtilement propre et d'une nature humaine telle que l'on pourrait se demander si le sauvetage de l'espèce est vraiment souhaitable.
L'Art de la fugue.
07,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Malgré une distribution alléchante, on ne résiste pas toujours à la tentation de la facilité : scénario monomaniaque sur les frivolités de chacun (jusqu'à l'illisibilité), lieux communs humoristiques, interprétation décevante et réalisation plate. On aurait pu espérer que tant de fausses notes s'annulent entre elles afin de se maintenir une cohérence artificielle, mais l'intérêt de l'ensemble demeure malheureusement fort limité. Seule tentative d'originalité : la banalisation de la vie de couple homosexuelle. Il était temps.
L'Enquête.
09,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Un gâchis à peine croyable par l'échec du mélange des genres. Documentaire mal scénarisé ? Thriller souffrant de réalisme historique ? Rendons néanmoins à César la noblesse de son intention de vulgariser une affaire tentaculaire et hautement complexe au sommet des sphères politico-financières. La fragilité des lanceurs d'alerte amène à s'inquiéter sur la qualité de l'information et sur le lien entre gouvernants et finance internationale, creusant ainsi le double fossé (culturel et économique) qui les sépare des citoyens qu'ils sont censés servir.
Le dernier coup de marteau.
17,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Le point de vue interne de ce pré-adolescent introverti est appréciable pour mieux cerner son tiraillement entre déterminismes familiaux et sociaux d'un côté, apprentissages artistiques et sexuels de l'autre. Une légère déception concernant la clarté du message transmis, brouillée par la surfocalisation du scénario sur un quotidien sans ambition, ainsi qu'une fin trop ouverte, détissant le peu d'espoir de renouveau attendu par le spectateur. Ce "bémol" est lui-même nuancé par une interprétation de qualité, humaine car authentique.
Le Prix à payer.
16,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
L'analyse marxienne du monde, dépassée ? Pas le moins du monde : entre rapports de classes reliftés et inégalités abyssales, la fissuration du néo-capitalisme financier passe par des opérations déliées de l'économie réelle, motivées par une cupidité amorale et impatiente, les spéculateurs ayant une confiance aveugle dans la technologie. L'avenir économique est-il désormais associé aux sciences dites "exactes" ? Alea jacta est. Un documentaire de qualité qui, sans valider les théories complotistes, met en exergue la capitulation (temporaire ?) du politique.
Les nouveaux héros.
17,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Un agréable lifting du cinéma d'animation, teinté d'humour à plusieurs degrés, d'un conventionnalisme décalé, le tout orné du talent graphique auquel Disney nous a toujours habitués. Si la psychologie des personnages semble insuffisamment cousue, tandis que le troisième quart du scénario tombe peut-être dans la facilité, l'insistance sur la philanthropie compense tout à fait, dans un monde séduit toujours davantage par l'individualisme.
Les Nouveaux sauvages.
19,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
La confrontation du "Ça" et du "Surmoi" extraordinairement mise en lumière à travers des scenarii si éloignés... et pourtant si semblables. Secoués dans nos retranchements les plus intimes, tout notre spectre émotionnel est activé : effet catharsis garanti ! La violence visible n'est en réalité qu'à l'image de la violence sociale : l'extrême division des rôles dilue la responsabilité individuelle à un stade tel qu'elle devient quasi inexistante. Devons-nous y voir un totalitarisme 2.0 latent ?
Les Nuits d'été.
15,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Une captivante mise en relation entre guerres internationales et intranationales. La brutalité des mœurs établies conduit à une nouvelle forme de résistance qui semble annoncer la gestation pré-soixante-huitarde. Un malaise généralisé déroutant mais intrigant, qui finit par nous familiariser avec un monde clos sur lui-même, jusqu'à en devenir attachant. Une belle leçon de tolérance - ou, devrait-on dire - de compréhension de l'autre, en ces temps de stigmatisation de la "différence", finalement assez factice.
Love Circus.
18,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Une bulle de rêve ressuscitant les cœurs les plus pétrifiés : l'atmosphère vous propulse dans un idéal intemporel, amoindrissant les petits soucis personnels. Entre interactivité, mélange des registres et synthèse des époques, tout devient partie prenante d'un bonheur dont on oublie trop facilement la portée collective. Les numéros sont grandioses, la troupe fabuleuse, et les moyens techniques exceptionnels. L'envoûtement est permanent ; car bienveillant ?
Mon fils.
17,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Ni relativisme, ni contorsion stérile, ni moralisme : on désamorce remarquablement les clivages politiques en y superposant les polémiques sociétales (vivre-ensemble, fin de vie, modèles familiaux alternatifs) souplement imbriqués. L'harmonie et l'autodérision peuvent-elles néanmoins encore subsister au Proche-Orient ? Profitant de notre méconnaissance du quotidien local, la finalité semble être moins descriptive que projective ; mais qui le condamnerait ici ?
Papa ou Maman.
13,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Un contre-modèle s'opposant à l'idéal autodestructeur des couples usés. L'hyperactivité moderne et la complexification des modèles familiaux sont bien mis en valeur, bien que le sprint scénaristique conduise à un marasme chaotique qui laisse sur sa faim. Les exagérations en tous genres et le recyclage de lieux communs risque d'alimenter la pensée réactionnaire. Mais sans être la comédie de l'année, un bon moment de rigolade en perspective !
Phoenix.
15,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
À défaut de reconstruire, on re-construit. Où se délimite le "Moi" ? Un nom, un visage, un sentiment, un souvenir ? Malgré l'usure du genre, le traumatisme est parfaitement retranscrit, ainsi que le désenchantement d'une société tout entière, elle-même perdue dans sa propre reconquête d'identité. Qui, et surtout que croire ? Quand la perte est trop grande, la méfiance doit céder la place à l'intuition. Un regret concernant la prévisibilité du scénario... le filon y était !
Respire.
18,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Vous la sentez ? Cette Tramontane qui vous pénètre à petit feu. Méfiez-vous de ce que vous inhalez dans votre entourage. Mélanie Laurent a su briser le tabou de la perversion narcissique, touchant près de 10 % d'entre nous. Ce fléau contemporain est très bien retranscrit dans ce qu'il a de malaisé, d'oppressant, de déstructurant psychologiquement, les victimes devenant, malgré elles, prédatrices à leur tour... devant l'incompréhension générale. Ne soyons plus les complices passifs de ces drames latents qui germent sous nos yeux ; agissons.
The Imitation Game.
18,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Ou l’œil du cyclone de l'histoire contemporaine. Un questionnement intéressant sur le rapport entre justice et morale, sur la complexité de la psychologie humaine, sur le rôle des institutions et sur l'influence du hasard dans nos vies individuelles et collectives. Un film engagé donc engageant, comme je les aime. Du réalisme historique à couper le souffle, qui n'a (hélas !) rien perdu de son actualité et qui, je l'espère, alimentera le débat public.
The Voices.
16,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Du cynisme électrisant, humanisant une pathologie si souvent évoquée et pourtant si méconnue. L'écho dextérien, s'il est regrettable, est contrebalancé par la mise en relief des problématiques liées au malade, à ses proches, ainsi qu'aux défaillances de leur prise en charge par la société. L'exagération est omniprésente - pour ne pas dire exaspérante - mais faisons-nous une raison, le cahier des charges états-unien est à l'image de leur constitution : immuable.
Timbuktu.
18,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Entre désenchantement et résistance face à l'oppression, la fameuse métaphore du roseau de J. de la Fontaine ("Je plie, et ne romps pas") est brillamment illustrée. Le jeu d'acteurs est touchant, sans artifices ; la réalisation, épurée, s'incline humblement face à l'aura naturelle des décors. Une portée politique oxygénante en ces temps de tension interreligieuse croissante et d'amalgames détestables entre islam et islamisme. En somme, une universalité qui valait bien 7 Césars.
Une merveilleuse histoire du temps.
18,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
N'opposons pas les contrastes, ils sont complémentaires : la passion motive la raison, la concision est une garantie efficace de qualité, la différence est la valeur refuge de la norme, l'autodestruction est le moteur de la pulsion de vie, et la complexité est la conjonction d'éléments simples. Un self-made-man à l'anglo-saxonne, incarnant labeur, volontarisme, fidélité, mérite et reconnaissance par sa valeur propre. Un fort bel éclairage sur la valeur de la vie et la puissance de l'espoir. Félicitations pour le jeu admirable d'Eddie Redmayne.
15,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Pour témoigner, les mots ne manquent jamais ; c'est notre capacité à les mobiliser qui peut être affectée par l'intensité de l'événement. Il était donc pertinent de s'immiscer dans cet univers vampirisant : surfer sur le tsunami, ou fuir en vain les terres qu'il menace ? On touche à la souche des maux sociétaux actuels : refoulements, harcèlements polymorphes, hypocrisie sociale, discriminations, survie en communauté, cadres éducatifs et familiaux dépassés. Personne n'est à sa place ; mais essentialiser cette génération était à mon sens une erreur.
Amour fou.
17,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Une originalité appréciable dans les problématiques soulevées : rôle(s) de l'amour, valeur de la vie et déterminismes sociaux émergent curieusement dans ce microcosme nobiliaire où l'authenticité sonne toujours faux. Le mal-être est présenté dans son essence à la fois comique, dramatique, absurde parfois. L'essoufflement rapide du scénario est compensé par des plans abrupts au classicisme exacerbé, (bien que toujours séduisants), tandis que les acteurs, costumes et décors sont d'une qualité remarquable.
Big Eyes.
19,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Décalé, l'univers burtonien ? Jusqu'à son propre registre. Mais toujours cette capacité de saisir la réalité par le trou de la serrure. Peindre, c'est d'abord dépeindre : un système marchandisant auquel on soumet son intériorité, dichotomie funeste entre l'art et sa promotion. Un cynisme naturel, pénétrant, et d'autant mieux dénonciateur de dérives humaines invisibles aux insensibles. D'élégants contrastes entre les protagonistes, via ce fascinant équilibre entre vulgarité et finesse. Est-il donc nécessaire de regretter certains légers excès théâtraux au cours du procès ?
Birdman.
19,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Les réalités se frôlent ; les comédiens en sont le ciment instable. Quel est le rôle du rôle ? Une exquise intrusion dans l'intimité de ces illustres Sisyphe admirés mais si méconnus, condamnés à fuir le vide sans jamais atteindre un quelconque horizon. Les répliques cinglantes dévoilent le mot tantôt outil stérile, tantôt glaive ensanglanté. Un plan-séquence déroutant mais déroulant la cohérence filigranée d'un univers où tout se superpose... sans pause. Profession-refuge des maudits ou véritable schizophrénie professionnelle au service d'un public aisé ?
Coco avant Chanel.
18,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
L'irrésistible ascension d'une personnalité puissante par son insatiable soif d'indépendance et de reconnaissance. Un rôle "taillé sur mesure" à Audrey Tautou, dont l'excellence tend à se normaliser. L'émotion est là : les destins en devenir trouveront chaussure à leur pied, bouleversés par cet idéal de consanguinité entre rupture sociale méritante, authenticité à peine voilée et révolution personnalisée. On dévêt le mythe pour mieux l'orner. Du grand art, sans fioritures ; merci.
De bon matin.
17,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Pédagogie, clarté, efficacité : toute fioriture spectaculaire aurait en effet nui à la compréhension de ce flashback d'une descente aux Enfers inexorable : déstructuration mentale, violence extrême sans hématome et segmentation individualiste brisent vertus et principes sans considération du secteur d'activité ou de la personnalité initiaux. Malgré un mélimélo troublant concernant la vie familiale de Paul, de très nobles qualités cinématographiques, en tous points de vue.
Gainsbourg, Vie héroïque.
14,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Diabolique entrée dans une de ces niches de vie étanches au monde. On présente un artiste maudit jusqu'aux gènes, dont le génie gêne, irrite, mais palpe et captive. Entre ambivalences apparentes et cohérence intime, la caricature était difficile à éviter. On semble parfois s'éloigner de l'intérêt biographique, et les effets spéciaux laissent parfois à désirer. Représenter l'audace par l'audace était pertinent, mais ne paie pas toujours ; il faut savoir ne pas se laisser dépasser par son objet.
Kertu.
18,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
À moins de vivre en autarcie, la campagne n'a rien de reposant : elle n'est qu'un microcosme urbain, les tentacules de l'Etat en moins. Elle a ses lois : le non-dit, le tacite, le secret, le complot, la traîtrise ; le repli. Malheur à ceux qu'elle marginalise et dénature en toute impunité. Un brillant, mais sombre état des lieux sur la communautarisation humaine en tant qu'elle brise le respect par sa morale. Jusqu'à ce que la violence brise son propre cercle. Une saine approche du malsain ; palpitant.
Kingsman : Services secrets.
14,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
À la fois exaspérant et magnétique, dérangeant et complice, redondant et borderline, recyclé et révolutionnaire ; le chaud et le froid sont soufflés en permanence. Au premier degré, une n-ième comédie d'espionnage. Au second, sa caricature hilarante. Au troisième, un film sui generis dont la finalité est de jouer avec nos réflexes de catégorisation. Il faut parfois cesser d'intellectualiser, et savoir profiter d'une violence subtilement propre et d'une nature humaine telle que l'on pourrait se demander si le sauvetage de l'espèce est vraiment souhaitable.
L'Art de la fugue.
07,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Malgré une distribution alléchante, on ne résiste pas toujours à la tentation de la facilité : scénario monomaniaque sur les frivolités de chacun (jusqu'à l'illisibilité), lieux communs humoristiques, interprétation décevante et réalisation plate. On aurait pu espérer que tant de fausses notes s'annulent entre elles afin de se maintenir une cohérence artificielle, mais l'intérêt de l'ensemble demeure malheureusement fort limité. Seule tentative d'originalité : la banalisation de la vie de couple homosexuelle. Il était temps.
L'Enquête.
09,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Un gâchis à peine croyable par l'échec du mélange des genres. Documentaire mal scénarisé ? Thriller souffrant de réalisme historique ? Rendons néanmoins à César la noblesse de son intention de vulgariser une affaire tentaculaire et hautement complexe au sommet des sphères politico-financières. La fragilité des lanceurs d'alerte amène à s'inquiéter sur la qualité de l'information et sur le lien entre gouvernants et finance internationale, creusant ainsi le double fossé (culturel et économique) qui les sépare des citoyens qu'ils sont censés servir.
Le dernier coup de marteau.
17,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Le point de vue interne de ce pré-adolescent introverti est appréciable pour mieux cerner son tiraillement entre déterminismes familiaux et sociaux d'un côté, apprentissages artistiques et sexuels de l'autre. Une légère déception concernant la clarté du message transmis, brouillée par la surfocalisation du scénario sur un quotidien sans ambition, ainsi qu'une fin trop ouverte, détissant le peu d'espoir de renouveau attendu par le spectateur. Ce "bémol" est lui-même nuancé par une interprétation de qualité, humaine car authentique.
Le Prix à payer.
16,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
L'analyse marxienne du monde, dépassée ? Pas le moins du monde : entre rapports de classes reliftés et inégalités abyssales, la fissuration du néo-capitalisme financier passe par des opérations déliées de l'économie réelle, motivées par une cupidité amorale et impatiente, les spéculateurs ayant une confiance aveugle dans la technologie. L'avenir économique est-il désormais associé aux sciences dites "exactes" ? Alea jacta est. Un documentaire de qualité qui, sans valider les théories complotistes, met en exergue la capitulation (temporaire ?) du politique.
Les nouveaux héros.
17,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Un agréable lifting du cinéma d'animation, teinté d'humour à plusieurs degrés, d'un conventionnalisme décalé, le tout orné du talent graphique auquel Disney nous a toujours habitués. Si la psychologie des personnages semble insuffisamment cousue, tandis que le troisième quart du scénario tombe peut-être dans la facilité, l'insistance sur la philanthropie compense tout à fait, dans un monde séduit toujours davantage par l'individualisme.
Les Nouveaux sauvages.
19,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
La confrontation du "Ça" et du "Surmoi" extraordinairement mise en lumière à travers des scenarii si éloignés... et pourtant si semblables. Secoués dans nos retranchements les plus intimes, tout notre spectre émotionnel est activé : effet catharsis garanti ! La violence visible n'est en réalité qu'à l'image de la violence sociale : l'extrême division des rôles dilue la responsabilité individuelle à un stade tel qu'elle devient quasi inexistante. Devons-nous y voir un totalitarisme 2.0 latent ?
Les Nuits d'été.
15,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Une captivante mise en relation entre guerres internationales et intranationales. La brutalité des mœurs établies conduit à une nouvelle forme de résistance qui semble annoncer la gestation pré-soixante-huitarde. Un malaise généralisé déroutant mais intrigant, qui finit par nous familiariser avec un monde clos sur lui-même, jusqu'à en devenir attachant. Une belle leçon de tolérance - ou, devrait-on dire - de compréhension de l'autre, en ces temps de stigmatisation de la "différence", finalement assez factice.
Love Circus.
18,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Une bulle de rêve ressuscitant les cœurs les plus pétrifiés : l'atmosphère vous propulse dans un idéal intemporel, amoindrissant les petits soucis personnels. Entre interactivité, mélange des registres et synthèse des époques, tout devient partie prenante d'un bonheur dont on oublie trop facilement la portée collective. Les numéros sont grandioses, la troupe fabuleuse, et les moyens techniques exceptionnels. L'envoûtement est permanent ; car bienveillant ?
Mon fils.
17,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Ni relativisme, ni contorsion stérile, ni moralisme : on désamorce remarquablement les clivages politiques en y superposant les polémiques sociétales (vivre-ensemble, fin de vie, modèles familiaux alternatifs) souplement imbriqués. L'harmonie et l'autodérision peuvent-elles néanmoins encore subsister au Proche-Orient ? Profitant de notre méconnaissance du quotidien local, la finalité semble être moins descriptive que projective ; mais qui le condamnerait ici ?
Papa ou Maman.
13,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Un contre-modèle s'opposant à l'idéal autodestructeur des couples usés. L'hyperactivité moderne et la complexification des modèles familiaux sont bien mis en valeur, bien que le sprint scénaristique conduise à un marasme chaotique qui laisse sur sa faim. Les exagérations en tous genres et le recyclage de lieux communs risque d'alimenter la pensée réactionnaire. Mais sans être la comédie de l'année, un bon moment de rigolade en perspective !
Phoenix.
15,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
À défaut de reconstruire, on re-construit. Où se délimite le "Moi" ? Un nom, un visage, un sentiment, un souvenir ? Malgré l'usure du genre, le traumatisme est parfaitement retranscrit, ainsi que le désenchantement d'une société tout entière, elle-même perdue dans sa propre reconquête d'identité. Qui, et surtout que croire ? Quand la perte est trop grande, la méfiance doit céder la place à l'intuition. Un regret concernant la prévisibilité du scénario... le filon y était !
Respire.
18,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Vous la sentez ? Cette Tramontane qui vous pénètre à petit feu. Méfiez-vous de ce que vous inhalez dans votre entourage. Mélanie Laurent a su briser le tabou de la perversion narcissique, touchant près de 10 % d'entre nous. Ce fléau contemporain est très bien retranscrit dans ce qu'il a de malaisé, d'oppressant, de déstructurant psychologiquement, les victimes devenant, malgré elles, prédatrices à leur tour... devant l'incompréhension générale. Ne soyons plus les complices passifs de ces drames latents qui germent sous nos yeux ; agissons.
The Imitation Game.
18,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Ou l’œil du cyclone de l'histoire contemporaine. Un questionnement intéressant sur le rapport entre justice et morale, sur la complexité de la psychologie humaine, sur le rôle des institutions et sur l'influence du hasard dans nos vies individuelles et collectives. Un film engagé donc engageant, comme je les aime. Du réalisme historique à couper le souffle, qui n'a (hélas !) rien perdu de son actualité et qui, je l'espère, alimentera le débat public.
The Voices.
16,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Du cynisme électrisant, humanisant une pathologie si souvent évoquée et pourtant si méconnue. L'écho dextérien, s'il est regrettable, est contrebalancé par la mise en relief des problématiques liées au malade, à ses proches, ainsi qu'aux défaillances de leur prise en charge par la société. L'exagération est omniprésente - pour ne pas dire exaspérante - mais faisons-nous une raison, le cahier des charges états-unien est à l'image de leur constitution : immuable.
Timbuktu.
18,0/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
Entre désenchantement et résistance face à l'oppression, la fameuse métaphore du roseau de J. de la Fontaine ("Je plie, et ne romps pas") est brillamment illustrée. Le jeu d'acteurs est touchant, sans artifices ; la réalisation, épurée, s'incline humblement face à l'aura naturelle des décors. Une portée politique oxygénante en ces temps de tension interreligieuse croissante et d'amalgames détestables entre islam et islamisme. En somme, une universalité qui valait bien 7 Césars.
Une merveilleuse histoire du temps.
18,5/20 : Thématique : ********** - Scénario : ********** - Réalisation : ********** - Interprétation : **********
N'opposons pas les contrastes, ils sont complémentaires : la passion motive la raison, la concision est une garantie efficace de qualité, la différence est la valeur refuge de la norme, l'autodestruction est le moteur de la pulsion de vie, et la complexité est la conjonction d'éléments simples. Un self-made-man à l'anglo-saxonne, incarnant labeur, volontarisme, fidélité, mérite et reconnaissance par sa valeur propre. Un fort bel éclairage sur la valeur de la vie et la puissance de l'espoir. Félicitations pour le jeu admirable d'Eddie Redmayne.