Aussi versatile soit sa personne, D. Trump a le mérite d’incarner son temps sur un point : il représente l’ère post-factuelle (ou post-vérité) à laquelle nous nous habituons. Les théories complotistes se diffusent, les négationnismes s’assument, les fake news infiltrent tous les médias et la parole publique manque cruellement de fact-checkers.
Craint par le philosophe H. Frankfurt dès 1986, le « baratin » (bullshit) se révèle être bien plus néfaste à la vérité que le mensonge (lie) puisqu’il nie la notion même de vérité et ne se réfère qu’à ce qui pourra servir ses propres objectifs. Le rapport entre le vrai et le faux est alors dépassé : place au « prétendu » et au « cru ».
Ces sophismes contemporains dérangent d’autant plus qu’ils brouillent la relation entre les « montreurs de marionnettes » décriés par Platon et leur public. En effet, si l’information n’a jamais été aussi accessible avec le développement des nouvelles technologies, son extrême pluralité incite les « consommateurs » à se conforter dans des lectures qui leur ressemblent. Une fois l'« infobésité » généralisée, où débute et où se termine la manipulation, à cheval entre complicité et duplicité des acteurs ?
Ainsi, les plaignants consolident le système qu’ils dénoncent : les internautes engraissent la Toile d’informations faillibles, les journalistes copient entre eux des sources négligées, les personnages politiques taisent les faits dérangeants et les professionnels condamnent la novlangue de leur secteur autant qu'ils la parlent au quotidien.
Au pays de la distorsion du réel, la communication est reine. Côté émetteurs, on construira une superficialité évolutive selon les tendances, les sondages, les humeurs, tout en laissant entrevoir un faisceau d’indices invitant à l’analyse de l’arrière-plan. Côté récepteurs, on décodera messages cachés et intentions inavouées en spéculant collectivement ; c’est le pouvoir du buzz inopiné où le détail s’affranchit de l’ensemble, où l’ambiance se substitue au contexte, où l’émotion noie le fait.
Lorsque la forme ne correspond plus au « fond qui remonte à la surface » hugolien, mais ancre la vérité dans les abysses du paraître, l’esprit critique courbe l’échine devant la critique de l’esprit. Assiste-t-on au retour d’un empirisme primaire ou à l'essor d'un monde aux vérités multiples ? Ces quelques lignes échapperont-elles au moins à cette funeste alternative ?
Giuseppe
Visible sur les sites :
- www.vivrealibourne.com (rubrique « Blog - Giuseppe ») ;
- www.patrimoine33.com (rubrique « Le blog de Giuseppe »).
Craint par le philosophe H. Frankfurt dès 1986, le « baratin » (bullshit) se révèle être bien plus néfaste à la vérité que le mensonge (lie) puisqu’il nie la notion même de vérité et ne se réfère qu’à ce qui pourra servir ses propres objectifs. Le rapport entre le vrai et le faux est alors dépassé : place au « prétendu » et au « cru ».
Ces sophismes contemporains dérangent d’autant plus qu’ils brouillent la relation entre les « montreurs de marionnettes » décriés par Platon et leur public. En effet, si l’information n’a jamais été aussi accessible avec le développement des nouvelles technologies, son extrême pluralité incite les « consommateurs » à se conforter dans des lectures qui leur ressemblent. Une fois l'« infobésité » généralisée, où débute et où se termine la manipulation, à cheval entre complicité et duplicité des acteurs ?
Ainsi, les plaignants consolident le système qu’ils dénoncent : les internautes engraissent la Toile d’informations faillibles, les journalistes copient entre eux des sources négligées, les personnages politiques taisent les faits dérangeants et les professionnels condamnent la novlangue de leur secteur autant qu'ils la parlent au quotidien.
Au pays de la distorsion du réel, la communication est reine. Côté émetteurs, on construira une superficialité évolutive selon les tendances, les sondages, les humeurs, tout en laissant entrevoir un faisceau d’indices invitant à l’analyse de l’arrière-plan. Côté récepteurs, on décodera messages cachés et intentions inavouées en spéculant collectivement ; c’est le pouvoir du buzz inopiné où le détail s’affranchit de l’ensemble, où l’ambiance se substitue au contexte, où l’émotion noie le fait.
Lorsque la forme ne correspond plus au « fond qui remonte à la surface » hugolien, mais ancre la vérité dans les abysses du paraître, l’esprit critique courbe l’échine devant la critique de l’esprit. Assiste-t-on au retour d’un empirisme primaire ou à l'essor d'un monde aux vérités multiples ? Ces quelques lignes échapperont-elles au moins à cette funeste alternative ?
Giuseppe
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